Matthieu, un précurseur
Aujourd’hui 2 mai, visite tant attendue de la houblonnière de Matthieu Cosson : le Champ du Houblon. Pourquoi tant attendue ? Parce que Matthieu est un pionnier, un dieu vivant pour tous les brasseurs artisanaux français. Ou au moins pour ceux pour qui l’approvisionnement en houblon local est un objectif. Car parvenir à acheter des houblons « modernes » et BIO à un producteur français est aujourd’hui une gageure.
Aussi, quand Matthieu a lancé son projet en 2016, 1er projet de houblonnière en France hors coopérative, a-t-il vu tous les projecteurs se braquer sur lui.
Trois ans après, c’est toujours vrai. Car les difficultés du projet sont, paradoxalement, aussi grandes que l’attente qu’il provoque.
Difficultés en termes d’investissement : un projet de houblonnière nécessite une quantité importante de matériel, et ne rapporte qu’au bout de 3 ans. Les aides pour ce type de projet agricole sont par ailleurs peu nombreuses, car « ce type de projet » n’existe pas ! Le projet de Matthieu étant une première. Alors que l’objectif de Matthieu est de produire des houblons pour les brasseurs artisanaux qui s’installent depuis quelques années : Cascade, Chinook, Nugget, Brewers Gold…
Difficultés techniques encore, car chaque étape est complexe et risquée. Lors de notre passage au Champ du Houblon, Matthieu nous consacre 2 heures pour nous expliquer, avec autant de franchise que de bonne humeur, tous les enjeux et difficultés de son projet. Et nous détaille également toutes les composantes de son métier.
Tout d’abord la culture.
Le houblon est une liane, qui pousse à partir d’un rhizome. Début mai, la liane a commencé à pousser et Matthieu et sa stagiaire Zoé s’apprêtent à débuter la « mise au fil » : sélectionner 2 ou 3 brins par pied qu’on enroule autour d’un tuteur. Matthieu a préféré des tuteurs en fibre de coco, du Sri Lanka à des fils de fer.
Où produit-on le houblon ?
Les régions de production principales du houblon en France aujourd’hui sont les Flandres et, surtout, l’Alsace. Mais il était cultivé historiquement partout. Un des avantages de le cultiver en Loire-Atlantique est la pluviométrie de la région, le houblon étant gourmand en eau. Sa culture en Alsace demande beaucoup d’irrigation. Le traitement des champs occupe une grande part du temps du houblonnier, le houblon étant très sensible aux maladies.
Bio ou Biodynamie ?
En BIO, le traitement principal est le cuivre, mais qui peut s’avérer toxique pour les sols au fil des années.
Très soutenu par ses voisins agriculteurs, qui travaillent en Biodynamie, il dynamise lui aussi ses sols. La récolte a lieu en septembre. Le houblon est ensuite trié, puis séché, et mis en sac. La machine de tri permet de ne garder que les cônes, femelles, et de se débarrasser de la liane, qui est ensuite compostée.
Pour la suite, les projets de Matthieu sont multiples
D’abord améliorer et stabiliser le rendement des récoltes, ainsi que du séchage, pour pouvoir mieux approvisionner les brasseurs artisanaux avec lesquels il travaille.
Mieux comprendre ses propres houblons et les particularités de son terroir, en travaillant avec un laboratoire nantais qui lui permet par exemple de quantifier ses taux d’acide alpha (qui permettent aux brasseurs de prévoir l’amertume de leur bière). Poursuivre les collaborations avec des brasseurs en leur permettant de brasser avec du houblon frais, technique inhabituelle. Enfin, contribuer au développement d’une filière du houblon BIO français, en local, notamment en tant co-président de l’association « Houblons de France ».