Un renard.
Une biche.
Deux chevreuils.
Trois brebis au milieu de la route.
Un oiseau.
Un (reste de) crapaud.
Un cormoran.
Quatre faisannes.
Un poisson.
Cinq cigognes.
Quelques porcs.
Un âne.
Une jument.
Un chat noir acrobate-écharpiste.
Des yeux bleus, verts, marrons, jaunes.
Des feuillages.
Des fanes de carottes dépassantes,
Du sable.
Des scintillements du soleil sur l’eau.
Certain.e.s vivant.e.s, d’autres mort.e.s. Les mort.e.s écrasé.e.s par les voitures.
Voilà ce que j’ai pu voir du bord au milieu des routes. Et une fois le pied à terre, de nouveau, des chevreuils beaux, proches et sensibles, des biches, poilues ou non, des âne.sse.s, têtu.e.s et charmant.e.s. De multiples êtres peuplent l’AlterTour, jusque nous en faire tourner la tête. Leur rencontre ressource, même avec les kilomètres.
Aujourd’hui, on en a fait 55 de km. Hier 80… Il semblerait que ça ait influencé notre rythme. Un clin d’œil au thème de l’ALTERTOUR 2020 ? Prendre le temps.
Enfin, cette année, l’essentiel c’est peut être d’avoir continué à agrémenter de joie nos écarts et difficultés.
On part de Lessay, et on fait la pause cacahuète vers 11h30 à Blainville avec Philippe Hardy qui nous présente son travail autour de la pêche durable, assis.e.s à côté du stade de foot. Bon, on devait revoir le timing et 2-3 trucs alors dans mon rôle de préparatrice d’étape, je n’ai pas tout écouté. En tous cas, au repas du midi les altercyclistes m’ont expliqué qu’il a détaillé une façon respectueuse de tuer les poissons. Ça questionne. Les avantages de ce genre de discours, pour quelle cible. Il nous a parlé des saisonnalités de la pêche, de la pêche à la ligne versus chalutier, nous a rappelé la bd de Pénélope Bagieu sur la pêche en fond marin, de sa façon de travailler en direct avec des pêcheureuses. Et il nous a parlé d’une méthode usitée par une quinzaine de cuisinier.e.s en France qu’il a découverte au Japon il y a des dizaines d’années.
Cet homme fort bien équipé pour le vélo qui a pédalé avec nous aura donc passé une pause cacahuète à nos côtés. Car « A l’alter tour, c’est pause cacahuète tous les jours, c’est la satiété, jusqu’au déjeuner lalalala » comme chanterait Quentin. Puis à midi on a été à l’école de voile d’Hauteville entre repas de folie et baignade incroyable. Car chose promise, chose due, les baignades étaient au rendez-vous dans le Cotentin : St Marcouf, Cherbourg, Portbail, Hauteville ! Puis derniers km. Une route qui n’avait pas été testée… Quelques allers retours… Moins de 4km c’est sur. Le tout qui passe en douceur grâce aux mimes d’animaux marins de nos flèches humanoïdes indicatrices de chemins et aux doux paysages traversés. Vues sur mer récurrentes, que ce soit en haut d’une côte ou le long d’une descente.
Le soir on arrive à la ferme du Bois Landelle avec Carlotta en guide sur les derniers mètres. On est accueilli.e.s par les membres de l’Alter-D-Tour en grandes trombes.
Lucie puis Willow nous font une visite express de leur ferme. Sur la ferme de 60ha, il y a 2 paysans boulangers, 1 paysanne en micro maraîchage, ancienne institutrice qui a claqué la porte pour se concentrer sur un retour à la Terre, 8 vaches et celui qui transforme leur lait en fromages que nous dégustons d’ailleurs, quelques truies avec leurs cochons. Parmi les membres, 3 d’entre elleux n’ont pas utilisé de banque pour leur installation. L’autonomie est visée. La farine est faite sur place, des circuits courts entre les différentes activités s’arrangent, un marché de producteurices du coin est organisé toutes les semaines.
Et il y a aussi un magnifique couché de soleil. Du rose, du bleu, du violet, pour un subtil mariage agrémenté de nuages. Le tout à la normande. Feu d’artifice de douceur et de joie. Une dernière journée de pédalage pour moi qui finit autour d’un verre avec Pierrot qui nous alpague pour nous confier un grand secret : voilà, c’était la première fois qu’à un ALTERTOUR il allait se présenter à l’appel des personnes partantes. Émotion émotion, lui qui vient de passer son 71ème anniversaire sur son fidèle destrier à nos côtés, et que Loulou aura entendu s’auto encourager lors des fameuses montées. Pendant que la boum bat son plein dans la yourte et que la pole dance sur bambou se fait connaître, je vide mon bol de bière à la santé du Pierrot et de cet altertour. Au clair de la lune, bonne nuit.