Avril 2013, garden-party ensoleillée sur le parking du concessionnaire Ferrari de Bayonne. Sous une grande banderole annonçant : « La crise, quelle crise ? », les militants de « Bizi ! » ont sorti coupes à champagne et diamants de pacotille pour fêter avec ironie le record de vente historique de la marque Ferrari en 2012. 2012… année de crise et d’austérité. Cette action, point d’orgue d’une campagne contre la démesure, visait à illustrer le fait que la crise n’est pas celle de tout le monde, que l’accumulation démesurée de profits par une minorité est à la base des crises sociale et écologique actuelles. La notion de démesure et de dépassement des limites se retrouve au cœur de notre société.
Il nous paraît évident aujourd’hui que la démesure caractérise notre société au niveau écologique, au niveau des inégalités sociales, au niveau économique avec le mythe de la croissance infinie, et au niveau de notre rapport au temps et à l’espace, par le désir d’aller toujours plus vite, plus loin et plus souvent.
Mais on peut se demander si la démesure ne caractérise pas notre société encore plus profondément dans sa dimension politique et démocratique. Geneviève Azam explique ainsi que « l’une des premières conditions de la démocratie est (…) l’acceptation raisonnée et assumée de la finitude du monde et de sa fragilité ». Jacques Testart, lui, aborde une dimension qui touche la nature même de l’humanité avec le développement de l’idéologie transhumaniste et le refus de la « finitude » de l’humain, le rêve d’une jeunesse éternelle, le tabou sur la mort.
A ces fantasmes de démesure, à cet imaginaire collectif si peu remis en question, que pouvons-nous opposer ? Le fait que le bonheur passe par l’acceptation de ses limites et que la loi est le fondement de la liberté ? Au-delà des mots, nous pouvons agir pour proposer un autre modèle de société, ouvrir toujours plus de pistes vers un avenir où le bonheur de chacun ne se fera pas au détriment de l’autre et de la nature.
Jonathan Palais, Elise Bancon, Txetx Etcheverry